communiquer / communiquer

Y’a un petit moment déjà, je voulais vous parler de la pub actuelle du fournisseur d’accès à Internet Orange (mon mien, d’ailleurs), parce que pour une fois, je trouvais qu’une pub se montrait assez fine et créative. J’aime comme elle joue sur le double sens de certains mots … une rencontre  /  une rencontre (et j’apprécie tout particulièrement le choix du chasseur qui baisse son fusil face au cerf)…………. une claque  /  une claque ……………
Mais depuis quelques jours, quand elle apparaît à l’écran, se mêle au plaisir de la voir la tristesse infinie d’un écho :
« Un suicide / Un suicide » …
J’aimerais beaucoup que cette boîte communique aussi bien sur le GROS malaise, sur les gestes DRAMATIQUES que sa nouvelle politique génère chez ses employés, qu’elle ne l’a fait dans son spot.

Communication.
Voilà le maître et traître mot.
On communique à tout va, tout le temps, sur tout, sur rien. Le bulletin météo est de plus en plus long, truffé de mots exigeants et pénibles (dépression, antitruc, normales saisonnières, cumulus (des mandats?), rafales…) ; les spots pour la grippe A nous rendent malades à l’avance ; les inspecteurs d’anglais nous demandent de privilégier la communication (et tant pis s’ils font des fautes, l’information DOIT passer, c’est ce qui compte) ; Over-Blog me casse la tête et parasite mon administration avec les 10 astuces pour rendre mon blog visible…
Des milliers d’exemples vous me trouverez …
J’entendais ce matin, à l’émission littéraire de la 5, l’un des trois invités déplorer ce bruit incessant et soupirer après le silence et la contemplation.

Je vous (re) livre un extrait d’un texte écrit en 1990. Ma foi, je suis certaine que je pourrais retrouver des extraits de textes antérieurs et non de ma main qui diraient à peu près la même chose.

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La colère avait grondé en elle depuis des années, née de la frustration, de la peur, de l’ennui parfois, et de son incapacité à y faire face ; née du quotidien des hommes des villes, où le lien qui unissait autrefois le travail et le fruit du travail était devenu si ténu et immatériel, où le bruit et le langage artificiel des machines, les millions d’icônes éclatées, l’entassement de papiers souvent inutiles et le respect parfois aveugle des règles brouillaient toute communication. La vérité des choses et des êtres s’était diluée dans les apparences, les faux-semblants et les trompe-l’œil, la possession et le besoin irrépressible de se voir en grand sur tous les écrans du monde. Le désir d’éternité était devenu si puissant qu’on y sacrifiait toute dignité, qu’on gommait toute excentricité véritable qui n’entrait pas dans les normes d’amuseurs publics dont la seule ambition de vie était de se voir encore plus grands sur les écrans des villes. La folie créatrice érigée en culte y perdait tout son élan vital. Malgré le dicton, l’odeur de l’argent imprégnait la vie des hommes, soit qu’on en manquât cruellement, soit qu’on en voulût plus qu’assez. Dans cette course, le temps s’était ramassé au point que le futur se vivait au présent et que le présent n’était plus. Curieusement la course contre la mort était devenue une course contre la vie. Non que tous ces défauts n’aient jamais existé auparavant, loin s’en fallait ! La multiplication des réseaux d’information leur avait simplement donné la formidable occasion de proliférer et de se fortifier.

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Internet, à l’époque, était une sorte de rêve … devenu presque cauchemardesque. Presque, car en étant vigilant, on peut en tirer le meilleur.

Ce qui me fatigue, ce sont toutes ces exigences mal placées. Il FAUT communiquer. Communiquer pour repousser, ignorer, détruire, cette part de vide qui nous habite et nous hante, qui nous attend.

C’est juste que y’a … »communiquer   /   communiquer »

Je voulais vous dire d’autres trucs … J’ai dévié … j’ai oublié …

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13 septembre 2009

juste une envie …

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9 juillet 2009