Les urgences gynéco
.
Je souffre depuis longtemps de terribles douleurs au moment des règles, un truc qui me fait marcher dans le salon pendant des heures la nuit, vomir, tomber dans les pommes, … Un jour, vu les absences que cela génère, vu l’inanité des suppositions des divers gynécos consultés et l’échec de plusieurs traitements, et après une nuit blanche, je décide d’aller à l’hosto. Déjà, à l’accueil, la fille (une compatriote, pourtant !) me regarde avec des yeux suspicieux. Quoi, ben oui, merde, on peut souffrir au point de venir aux urgences !
.
Arrivent deux blouses blanches qui m’emmènent dans un vilain petit cagibi jaunâtre et me questionnent tour à tour. Ils sont serbes, ils sont gentils et compatissants, mais on a beaucoup beaucoup de mal à se comprendre. Ils conciliabulent et m’emmènent à l’étage (on progresse ?) dans une salle d’examen toute bleue. Je n’ai pas bien compris ce qu’ils veulent m’y faire, ils disparaissent, ré-apparaissent, je commence à m’inquiéter, je vois déjà les titres de journaux : « Violée, torturée et massacrée par de faux médecins », genre.
.
Les voilà à nouveau, ils scrutent une machine, cherchant visiblement comment ça marche, quand déboule un vieux monsieur en blouse blanche, qui me pose deux trois questions, fait sortir les deux gentils zygotos pour leur parler dans le couloir, revient avec eux. Nouvel interrogatoire, cette fois-ci je comprends ce qu’on me dit. Mais quand même, je trouve que le vieux docteur (chef du service gynécologie, en fait !) a vraiment l’air vieux. Il râle parce qu’il n’y a plus de gel, part, revient, râle parce que le truc est pas branché, part, revient, explique aux internes ce qu’il va faire, râle parce qu’il n’y a plus de papier pour essuyer le gel… Moi, je suis déjà à demi-nue depuis vingt minutes !
L’échographie vaginale commence, mais je suis toute crispée. Le chef fait sortir mes « Pieds Nickelés » qui observent tout ça de très près en faisant des commentaires en serbe. Ca me perturbe…
Examen normal, rien à déclarer. Rhabillez-vous.
Euh, oui mais, voyez, je n’ai plus, hum,… de protection, comment dire… ? Il cherche un peu partout, râle parce qu’il n’y a rien, part, revient avec une serviette hygiénique d’au moins trois centimètres d’épaisseur et vingt-cinq de long. Hébétée, j’installe la couche et vérifie que mon manteau m’enveloppe bien.
Je pense en avoir fini, voilà une heure que je suis là, y’a rien à dire, rien à soigner. Mais le chef veut me faire une consultation, et m’emmène encore à l’étage au-dessus (est-ce vraiment le signe que je progresse, là ?), dans son cabinet, me faisant passer devant ses quatre patientes enceintes jusqu’aux yeux, qu’elles ont furibards à mon encontre. Une fois assis, il me raconte sa vie, me dit que « fumer c’est pas bien », qu’il va me prescrire un nouvel antalgique du tonnerre (le seul truc valable avec lequel je ressortirai de cet enfer, parce que là, ça vire au cauchemar !). Quand je suis enfin sur le point de le quitter, il se rappelle soudain qu’un petit examen de la poitrine s’impose. Allez, hop, une p’tite dernière, virez-moi ce soutif !
Là, il s’inquiète d’une petite masse au sein gauche, et m’envoie dans un grand cabinet parisien (16ème arrondissement, ça me coûtera les yeux de la tête, puisque, docile, j’y suis allée).
.
Au bout de deux heures, me voilà dans la pluie grise et fine d’un automne en banlieue, sans diagnostic, deux ordonnances en main, une légère inquiétude pour mon sein et l’impression – freudienne – d’avoir affreusement régressé, toute emmaillotée dans ma couche-culotte.
… et une furieuse envie de pleurer.
.
Mais qu’est-ce que ça a fait rire les potes !
.
.
.
(épisode à suivre avec la parution prochaine d’un article plus « sérieux » et informatif sur l’endométriose)
*
8 août 2008