des nouvelles du front (bas, le front)

Drôle de pré-rentrée.

Je vous le dis tout net, si vous ne l’aviez pas déjà deviné : je n’ai rien préparé. J’ai acheté deux stylos (en pensant surtout, au moment du choix dans les rayons déversant leurs plastiques colorés, à la reprise de mes « circonvolutions neuronales », dessins pour lesquels il me faut un stylo précis) et un grand cahier à petits carreaux.
J’ai posé ça sur la table Dimanche soir, avec le bel agenda tout en catalan acheté à Barcelone.

Réveil avec troubles visuels : une migraine! (Tiens … comme c’est bizarre…) Pas carabinée, heureusement, mais la cervelle au point mort, le corps un peu bizarre, cotonneux tout ça…

Me suis donc pointée vers 9h20 au réfectoire. Arrivant par derrière, personne ne m’a vue … sauf le personnel de direction, Madame la Principale en tête, qui interrompt son discours pour grinçouiller un fielleux et sonore : « Alors Mademoiselle Machin, quand même … » dont je n’ai pas entendu la suite, affolée en voyant environ 80 visages se tourner d’un bloc vers moi. J’avais déjà une sale tête… et 50 minutes de retard! (Pas trop eu besoin de me présenter aux nouveaux collègues, du coup)
Et tout le monde de me rassurer ensuite d’un chantant : « Oh mais tu n’as rien raté, tu sais! »

Si! J’ai raté notre nouvel Adjoint se présentant à nous. Du coup, j’ai passé la journée à l’appeler de dix manières différentes (disons, pour ne rien révéler de son identité, que ce monsieur porte le nom d’un bel arbre, avec la particule DU, DELA ou DE devant, et que moi je cherchais Monsieur Lamotte (?), Descombes (?), Dutronc, Malesherbes, Laforêt…).

Puis les longues réunions, loooongues réunions, où en gros, quand même, on redit les mêmes choses que celles mûrement réfléchies, dites, synthétisées et rapportées lors des longues, loooongues réunions de fin Juin – début Juillet (celles pour nous occuper histoire de dire qu’on ne part plus en vacances si tôt que ça…) et dont tout le monde se fout, enfin surtout l’Administration. En tout cas, c’est globalement comme ça que ça se passe (ou que je le perçois) dans mon établissement.
Exemple : on dit en Juin que l’on est d’accord pour une extension des plages horaires dans le collège (plus de 800 gamins pour des locaux prévus pour 600, ça finit par imploser l’ensemble) mais avec la garantie qu’aucune classe n’aura un emploi du temps contenant des journées de 8 heures. OUI! OUI! On vous le garantit! Voté! Ô toutes ces promesses votées…………………………….. Z’avez compris? Des clous! Une pensée pour eux, (et pour les profs qui vont les récupérer), aux dernières heures de la journée…

Après-midi qui s’est délitée sous la chaleur au chant des cigales; quelques coups de gueule discrets, des tractations d’emplois du temps à droite, à gauche, des échanges de salles, retrouver une clé, montrer le collège aux nouveaux venus… parler un peu des vacances … à peine…ranger des affaires … des petites réunions
Tout est normal.
Je suis où je dois être, à peu de choses près, je crois
Demain les kids. (enfin, après-demain pour moi)

Je suis contente de « reprendre une activité »;  de revoir des collègues;  de mon emploi du temps;  de bientôt voir les gamins.
Je suis contente que le collège ait pu intégralement renouveler (et étendre) son parc informatique, c’était Jurassic Park ici;  que l’on ait enfin pu changer nos manuels d’anglais en 6ème : on était quasi hors-la-loi!

Je m’inquiète de certaines décisions; de l’impact de cette extension de plages horaires, très mal ficelée, sur les gamins, et sur nous, par contre-coup; de la difficulté grandissante à organiser  des sorties, des voyages;  …  de la lente et sournoise métamorphose de notre métier …

A développer… les joies commes les peines …

*

1er septembre 2008

le vrai scandale, c’est la mort

Ecriture Ludique  /  consigne 48 : 15 mots imposés à utiliser en totalité et dans l’ordre donné : sens  /  vie  /  crise  /  testament  /  trivial  /  toxine  /  Bible  /  pleure  /  superflu  /  jouer  /  suivre  /  crier  /  venger  /  clairement  /  cyniquement

*

Ça n’a aucun sens. J’ai perdu  la vie, comme ça, sans crise, sans testament, par un jour de grand soleil, ciel blanc, petit vent.

Comme ça. Un trivial claquement de doigts d’une quelconque entité que je n’ai jamais su nommer, dont j’ai refusé les chimériques toxines ou la Bible ou la Torah, les manques ou les promesses d’une vie sur Mars amassées dans des banques.

Alors c’est comme ça ! On pleure, on rit, on meurt, on vit … On espère, on s’ennuie, on colère, on sourit … Et puis on bascule, on implose, sans raison sans cause, atome mineur et superflu d’un univers infini … Indéfini…

Comme ça !
Juste avant, une seconde avant, pieds nus dans l’herbe du jardin, je jouais de mes mains dans le très vieux figuier, baguettes de sourcier frémissant vers les fruits sucrés…

Comme ça !
Juste avant, une seconde avant, mon âme suivait une idée funambule  –  faire des rimes pour une libellule ! Mon ventre criait sa faim joyeuse au souvenir des figues savoureuses…

Alors c’est comme ça ! Mais qui donc se venge ainsi, et pour quel motif !? On sème, on arrose, on chantonne … On vient de raccrocher le téléphone… Et … Sans fracas ni silence, sans aucune ombre ni fragrance …

Pffuiiitt…

Comme ça. Une légère exhalaison du souffle, me voici à terre enlaçant le vieux tronc, la dernière note d’une chanson … Ma dernière danse avec un arbre…

Ça n’a aucun sens. J’ai perdu la vie, comme ça, sans avis, sans tralala. Clairement ce n’était pas prévu. Elle m’a vue rire, moi qui ai tant pleuré.

Cyniquement …

Sur moi …

Elle a …

Fondu …

*

30 août 2008